Résumé de la loi « haine »

Voici nos principales craintes concernant la proposition de loi visant à lutter contre les contenus haineux sur internet.

Cette liste est à jour du texte adopté par l’Assemblée nationale le 9 juillet 2019.

Délai de 24h

  • les grandes plateformes devront censurer en 24h les contenu « manifestement illicites » qui leur seront signalés ;
  • elles subiront une amende jusqu’à 4% de leur chiffre d’affaires en cas d’échecs répétés ;
  • sont concerné des acteurs non-commerciaux comme Wikipédia, qui n’ont pas les moyens des géants ;
  • ce délai de 24h est contre-productif ; il force les plateformes à traiter tous les contenus en même temps, alors que le droit actuel permet de traiter en priorité les contenus les plus graves ;
  • ce délai pousse à l’utilisation d’outils de censure automatisée, fondamentalement contraires à la liberté de communication ;
  • ce délai renforce la possibilité pour la police de faire de la censure politique (de même qu’elle avait signalé en janvier à Google une caricature de Macron en Pinochet, enregistrée en tant que « injure raciste »).

Contenus censurés

  • l’obligation de censure concerne tout contenu relevant de la haine raciste, sexiste ou contre les LGBT, de la pédopornographie ou de l’apologie des agressions sexuelles, des crimes contre l’humanité, de l’esclavage ou du terrorisme ;
  • est aussi condamnée l’assistance et l’intermédiation entre travailleuses du sexe, qui seront chassées du Web et exposées à plus de violence dans la rue ;
  • est aussi condamnée la mise à disposition de contenus pornographiques aux mineurs, ce qui ne peut être empêché qu’en identifiant toutes les personnes voulant accéder à ces contenus.

Censure permanente

  • les mêmes plateformes devront empêcher la rediffusions des contenus censurées, soumis aux mêmes sanctions que la censure en 24h ;
  • en pratique, cette obligation implique de recourir à des outils de censure automatisée surveillance l’ensemble des contenus publiés.

Internet transformé en TV

  • l’ensemble de la loi marque une conception du Net enfermé dans quelques grandes plateformes collaborant étroitement avec l’État, comme pour la TV ;
  • c’est le CSA, autorité normalement chargée de contrôler la TV, qui veillera donc au respect de la loi et à cette transformation (voir notre analyse plus détaillée).

Interopérabilité

  • la loi sera contre-productive car elle ne s’attaque pas au modèle économique des grandes plateformes (au contraire, elle le glorifie) ;
  • ce modèle est celui de l’économie de l’attention, qui accélère la diffusion des contenus nous faisant rester le plus longtemps et interagir le plus, quitte à favoriser les invectives, conflits et caricatures et à « censurer par enterrement » les propos plus subtils d’écoute et d’entre-aide ;
  • pour nous permettre de nous libérer de l’environnement toxique de ces géants, la loi doit les forcer à devenir interopérable : à nous permettre de les quitter pour rejoindre des alternatives moins toxiques et à taille humaine, tout en pouvant continuer à communiquer avec les personnes restées sur les géants. C’est la crainte de perdre cette communication qui fait que beaucoup d’entre nous y restons (voir notre analyse plus détaillée).