Lettre ouverte aux gouvernements du monde : protégeons le chiffrement !

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Paris, le 4 janvier 2016 — La Quadrature du Net s’est associée a des organisations et personnalités du monde entier en signant cette lettre ouverte aux gouvernements, pour les encourager et les inciter à promouvoir les techniques de chiffrement des communications et des systèmes informatiques. Le texte original et la liste des signataires peuvent être consultés sur le site « SecureTheInternet.org ».

Nous vous exhortons à protéger la sécurité de vos citoyens, de votre économie et de votre gouvernement, en soutenant le développement et l’usage d’outils et de technologies de communication sûrs, et en refusant toute mesure susceptible d’empêcher ou d’affaiblir l’utilisation d’un chiffrement fort, ainsi qu’en incitant les autres chefs de gouvernement à faire de même.

Les outils, technologies et services de chiffrement sont essentiels pour protéger notre infrastructure numérique et nos communications personnelles des intrusions indésirables. Le développement et l’utilisation libres du chiffrement sont aujourd’hui devenus la pierre angulaire de l’économie mondiale. A l’ère numérique, la croissance économique repose sur la capacité à faire confiance et à authentifier nos interactions, et à nous livrer à des activités commerciales en toute sécurité, à l’échelle nationale comme transnationale.

Certains des plus éminents experts et techniciens du chiffrement ont récemment expliqué que les lois ou politiques affaiblissant le chiffrement vont « forcer l’abandon des bonnes pratiques déjà en vigueur aujourd’hui et qui rendent Internet plus sûr », « augmenter significativement la complexité » des systèmes et les coûts associés, et « créer des cibles concentrées qui attireront les acteurs malveillants ». L’absence de chiffrement facilite l’accès à des données personnelles sensibles, notamment les informations d’identité et les données financières, par des criminels et autres acteurs malintentionnés. Une fois obtenues, les données sensibles peuvent être revendues, rendues publiques, ou utilisées à des fins de chantage ou de manipulation. De plus, des appareils ou du matériel insuffisamment chiffrés sont des cibles de choix pour les criminels.

Le Rapporteur spécial des Nations Unies pour la liberté d’expression a relevé : « le chiffrement et l’anonymat, et les concepts protecteurs qui en découlent, fournissent la confidentialité et la sécurité nécessaires pour l’exercice du droit à la liberté d’opinion et d’expression à l’ère numérique. » Alors que nous nous dirigeons vers la connexion du prochain milliard d’utilisateurs, des restrictions sur le chiffrement dans tout pays auraient probablement un impact global. Le chiffrement et autres technologies d’anonymisation permettent aux avocats, journalistes, lanceurs d’alerte, et organisateurs de communiquer librement au-delà des frontières et de consolider leurs communautés. Ils assurent également aux utilisateurs l’intégrité de leurs données et authentifient les individus auprès des entreprises, des gouvernements, et de leurs concitoyens.

Nous vous encourageons donc à soutenir la sûreté et la sécurité des utilisateurs en renforçant l’intégrité des communications et des systèmes informatiques. Tous les gouvernements devraient donc refuser les lois, mesures, mandats ou autres pratiques, y compris les accords secrets avec des entreprises, qui limitent ou affaiblissent l’accès au chiffrement ainsi qu’aux autres outils et technologies de communication sécurisés. Les utilisateurs devraient avoir le choix d’utiliser, et les entreprises de proposer, les méthodes de chiffrement les plus efficaces actuellement disponibles, y compris le chiffrement de bout en bout, sans craindre de voir les gouvernements les contraindre à fournir un accès au contenu, aux métadonnées ou aux clés de chiffrements, si ce n’est dans le respect à la fois de la procédure judiciaire et des droits de l’Homme.

C’est pourquoi :

  • Les gouvernements ne devraient pas interdire ou limiter de quelque façon que ce soit l’accès au chiffrement, ni interdire la mise en oeuvre ou l’utilisation du chiffrement en fonction de son standard ou de son type ;
  • Les gouvernements ne devraient pas imposer la création ou la mise en service de « backdoors » (portes dérobées) ou de failles dans les outils, les technologies ou les services ;
  • Les gouvernements ne devraient pas imposer que les outils, les technologies et les services soient conçus ou développés de façon à permettre à des tiers d’accéder aux données non chiffrées ou aux clés de chiffrement ;
  • Les gouvernements ne devraient pas chercher à affaiblir ou à dégrader les standards de chiffrement, ni à influencer intentionnellement l’établissement de standards de chiffrement, hormis dans le sens d’une amélioration de la sécurité de l’information. Nul gouvernement ne devrait imposer des algorithmes, standards, outils ou technologies de chiffrement insuffisamment sûrs ; et
  • Les gouvernements ne devraient pas, par des accords publics ou privés, forcer ou pousser une entité à des activités qui violeraient les principes ci-dessus.

Un chiffrement robuste et le déploiement d’outils et de systèmes sûrs qui reposent sur le chiffrement sont cruciaux pour améliorer la sécurité sur Internet, renforcer l’économie numérique, et protéger les utilisateurs. Pour continuer à tirer parti d’Internet comme moteur de croissance et de prospérité mondiales, et comme outil d’émancipation et d’activisme, il est nécessaire de pouvoir communiquer de manière confidentielle et sécurisée sur des réseaux de confiance.

En espérant travailler ensemble vers un avenir plus sûr.

Cordialement,

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