La décision du Conseil constitutionnel sur la loi Hadopi 2 ne devrait pas avoir de conséquences pour le piratage en France, passé l’anxiété qui gagnera nécessairement pendant quelques mois les internautes. On s’apercevra vite qu’il est possible de contourner l’Hadopi, ou de contester efficacement le sérieux des preuves devant les tribunaux. Mais la décision est grave pour la philosophie qu’elle traduit eu égard à la Justice.
[…] le Conseil constitutionnel s’est surtout contenté de botter en touche à deux niveaux. Il renvoie au juge la responsabilité de vérifier la matérialité de l’infraction imputée à l’abonné à Internet, et il renvoie au Conseil d’Etat la responsabilité de décider si le délit de « négligence caractérisée » de l’abonné, qui sera défini par décret, est suffisamment précis pour être accepté.
Car sauf enquête de police approfondie, avec saisie de l’ordinateur et vérification du contenu des disques durs, il est déjà acquis que l’Hadopi ne pourra pas aller jusqu’à la sanction. Comme l’a rappelé le Conseil constitutionnel, le procureur devra vérifier « si un supplément d’enquête ou d’instruction est nécessaire ou si les éléments de preuve rassemblés par les fonctionnaires et agents chargés de fonctions de police judiciaire suffisent à établir la culpabilité de la personne mise en cause« . Or un relevé d’infraction à distance opéré par les ayants droit et transmis à l’Hadopi ne devrait, en aucun cas, « suffir à établir la culpabilité« . Aucun juge ne l’accepterait, et encore moins une cour d’appel.
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