Vote final de la « loi haine »

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Mise à jour : tel que redouté, la loi a été adoptée dans sa pire version.

L’urgence de LREM est de donner à la police de nouveaux pouvoirs pour lutter contre le « terrorisme » sur Internet. L’Assemblée nationale votera le 13 mai 2020 la proposition de loi de Laetitia Avia qui, initialement présentée comme une loi « contre la haine », s’est transformée en janvier dernier en une loi « antiterroriste », telle qu’on en connait depuis des années, de plus en plus éloignée du principe de séparation des pouvoirs. Mercredi sera la dernière chance pour les député·es de rejeter cette dérive inadmissible.

Pour rappel, la proposition de loi initiale demandait aux très grandes plateformes (Facebook, Youtube, Twitter…) de censurer en 24h certains contenus illicites, tels que des contenus « haineux » signalés par le public ou la police. Pour une large partie, ces obligations seront inapplicables et inutiles, Laetitia Avia ayant systématiquement refusé de s’en prendre à la racine du problème – le modèle économique des géants du Web – en dépit de nos propositions, reprises par tous les bords du Parlement.

L’histoire aurait pu en rester à ce coup d’épée dans l’eau si le gouvernement n’avait pas saisi l’occasion pour pousser sa politique sécuritaire. Le 21 janvier, alors que la loi était examinée une deuxième fois par une Assemblée presque vide, le gouvernement a fait adopter un amendement de dernier minute renversant toute la situation.

Une nouvelle obligation vient éclipser le reste de la loi, ajoutée au paragraphe I de son article 1. Elle exige que tous les sites Web (pas uniquement les plateformes géantes) censurent en 1h (pas en 24h) les contenus signalés par la police comme relevant du « terrorisme » (sans que cette qualification ne soit donnée par un juge, mais par la police seule). Si le site ne censure par le contenu (par exemple car le signalement est envoyé un week-end ou pendant la nuit) la police peut exiger son blocage partout en France par les fournisseurs d’accès à Internet (Orange, SFR…).

La séparation des pouvoirs est entièrement écartée : c’est la police qui décide des critères pour censurer un site (en droit, la notion de « terrorisme » est suffisamment large pour lui donner un large pouvoir discrétionnaire, par exemple contre des manifestants) ; c’est la police qui juge si un site doit être censuré ; c’est la police qui exécute la sanction contre le site. Le juge est entièrement absent de toute la chaîne qui mène à la censure du site.

Le 26 février, le Sénat avait supprimé cette nouvelle disposition. Le texte revient mercredi pour une toute dernière lecture par l’Assemblée nationale, qui aura le dernier mot. Il est indispensable que les député·es suppriment l’article 1, paragraphe I de cette loi, qui permet à la police d’abuser de son pouvoir pour censurer le Web à des fins politiques – en cherchant à censurer les attaques contre le Président ou contre la police, comme elle le fait déjà.

Appelons les député·es sur cette page pour qu’ils rejettent ce texte.